Glaçant !
Glaçant, un mot qu’à présent on entend, on lit partout. Des ‘propos glaçants’ aux ‘images glaçantes’, nous consommons force glaces. A une époque où le réchauffement climatique fait fondre celles des pôles et des Alpes, nous nous en remettons aux mots et aux images pour nous rafraichir le dos, dégradant, au passage, la simple sensation de froid en broutille émotionnelle.
Glaçant, la métaphore en vaut bien d’autres : tel coin de paysage n’est-il pas obligatoirement à ‘couper le souffle’, toute plage qui se respecte n’est-elle pas forcément ‘paradisiaque’ et la vue depuis votre baie vitrée, si vous étiez chanceux, ne serait-elle pas ‘imprenable’ ? Oui mais, malheureusement, ‘le compte n’y est pas’. Quand une décision politique ‘ne fait pas l’unanimité’, cela, (et non l’inverse) devient une info. Le moindre évènement devient ‘culte’, tel stade ‘mythique’ et, bien sûr, on ‘ne lâche rien’.
Les esprits chagrins – les esprits sont souvent chagrins n’est-ce pas ? – trouveront la métaphorisation du parler médiatique, réseautique, quotidien, à la mode du moment, pauvre et répétitive. A l’instar des voix programmées du GPS ou de l’assistant personnel. Mais placez-vous du côté du locuteur, c’est fatigant de parler pour ne rien dire. A moins d’aimer, comme le poète, jouer avec les mots :
« Sur les crédences au salon vide : nul ptyx
Aboli bibelot d’inanité sonore… ».
Bof, Mallarmé, c’est trop savant, trop sophistiqué, et un peu gonflant. Alors, comme antidote au conformisme langagier, plutôt ce minuscule poème tiré de « Sens magique » de Malcolm de Chazal :
« Elle portait
Son sourire
Epinglé
A ses dents. »
Lazare Z