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Philodynamie
14 janvier 2022

AU GRE DES HUMEURS DE LAZARE : Liberté, passe sanitaire et Etat de droit

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Liberté ! Le premier mot de la trinité républicaine, le mot-titre du poème qu’Eluard a écrit au plus noir de l’Occupation est devenu, ces jours-ci, dans les manifestations antivax un mot-étendard inscrit en grosses lettres sur des pancartes de fortune.

Que l’on invoque la liberté, tant mieux, bien sûr ! Il y a toutefois un hic lorsque l’invocation est à contre-emploi. L’est-elle dans ce cas ? Elle est à tout le moins discutable. Comprenons-nous bien, il ne s’agit pas ci-après de verser dans la condamnation ou le soutien inconditionnel, mais de discuter. Je sais, dans le concert d’invectives qui tient aujourd’hui lieu de débat jusqu’à déborder trop souvent en déchainements de haine et de violence, discuter calmement est une gageure. Ce n’est pas parce que cela semble hors saison qu’il faut renoncer.

On peut comprendre que des personnes réticentes ou résistantes à la vaccination - étant observé que ne sera pas ici examinée la délicate question que pose cette attitude alors que l’on ne peut ignorer que la vaccination nous a permis de vaincre, entre autres fléaux, la variole, tuberculose, la poliomyélite et qu’elle se présente comme la meilleure parade que nous ayons trouvé contre la covid-19 - puissent ressentir les mesures de restriction qu’incorpore et symbolise le passe sanitaire, comme une atteinte à leur liberté dans ce qu’elle a de plus personnelle : la liberté d’aller et venir comme bon nous semble. La liberté, c’est d’abord une sensation et sa privation un manque frustratoire et douloureux. Or, tout en approuvant la stratégie de gestion de la crise sanitaire – a-t-on fait mieux ailleurs, en Europe ? – on ne peut qu’admettre que la verticalité de la prise de décision, la pauvreté des débats et la tendance à l’infantilisation de la population, ne sont pas propices à l’appropriation par tous les citoyens de la politique sanitaire.

On peut comprendre un état d’esprit sans pour autant le partager. Ceux qui brandissent la liberté comme un étendard semblent oublier qu’en société la liberté ne peut être que relative. C’est un droit fondamental qui peut, dans certaines circonstances, entrer en collision avec d’autres droits tout aussi fondamentaux. N’est-ce pas le cas avec le droit à la vie ? Plus de cent mille personnes en France sont mortes de la covid-19. D’autres continuent d’affluer dans les hôpitaux et leurs services de soins critiques. Dans un Etat de droit, lorsque deux droits fondamentaux se heurtent, il incombe aux pouvoirs publics, en dernière instance aux juges que sont, en France, le Conseil constitutionnel pour la loi, au Conseil d’Etat pour les règles prises par le Gouvernement, de les concilier. Ce qui signifie que les mesures de santé publique peuvent porter atteinte à la liberté mais ne sont valides que si elles sont nécessaires et que la gravité de l’atteinte doit être proportionnée à leur nécessité. Le débat est là ; il est juridique mais aussi politique. Saisis à de multiples reprises ces juges ont donné jusqu’ici une réponse positive. Nul doute que le Conseil constitutionnel sera ressaisi après le vote de la loi instituant le passe vaccinal. L’Etat de droit est garant de la liberté.

La liberté, on l’oublie parfois, va de pair avec la responsabilité. Les non vaccinés sont plus contagieux et, surtout, ils saturent les services d’urgence où ils mobilisent des moyens qui entraînent des déprogrammations de soins pour les patients non covid. Se demandent-ils, lorsqu’ils invoquent leur liberté, ce qu’ils peuvent faire, en paraphrasant le président Kennedy, pour leur pays et la libération de l’ensemble de leurs concitoyens des entraves que leur impose la pandémie ?

Lazare Z

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